Un renforcement de la démocratie parlementaire
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En 2019, un député luxembourgeois a sollicité la communication des conventions conclues entre l’État du Grand-Duché de Luxembourg et RTL Group. Dans le cadre d’une réunion de la Commission de la Digitalisation, des Médias et des Communications de la Chambre des Députés, le Premier Ministre, Ministre des Communications et des Médias, a refusé au député l’accès aux prédits documents, en se prévalant du secret des affaires et d’une clause de confidentialité incluse dans les conventions visées.
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Suite à ce refus de se voir communiquer les documents sollicités, le député a introduit un recours devant le Tribunal administratif, qui, par jugement en date du 12 août 2020 (n° 43866 du rôle) a considéré qu’il ne serait pas compétent pour trancher un litige opposant un député et le Gouvernement, la décision attaquée étant un acte de gouvernement qui, par sa nature, échappe au pouvoir de contrôle des juridictions administratives.
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Appel a été interjeté à l’encontre du prédit jugement.
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Par son arrêt du 26 janvier 2021 (numéro 44997C du rôle), la Cour administrative a réformé le jugement a quo. Elle a considéré qu’elle est compétente pour trancher le litige et a annulé la décision du Ministre des Communications et des Médias.
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La Cour a noté que « la demande de communication de documents formulée par le député ..., articulée avec précision, a été opérée par lui en tant que démarche indispensable et préalable en vue de pouvoir exercer sa mission de contrôle, en tant que membre de la Chambre des Députés, tenancière du pouvoir législatif ».
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Se fondant sur le régime de la démocratie parlementaire et le principe de l’État de droit, la Cour a précisé que « ce n’est pas de manière dirimante, parce que la décision ministérielle querellée est intervenue dans les relations entre un représentant du pouvoir exécutif et un député entendant exercer son contrôle en tant que membre du législatif, que la décision querellée posée par le ministre compétent aurait un caractère politique de nature aÌ€ la faire échapper ipso facto et ipso jure à la compétence du juge administratif ».
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La Cour a noté que la décision attaquée ne revêt pas un caractère politique, mais un caractère purement juridique.
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La Cour a considéré que « le principe fondamental de l’État de droit, ensemble le principe constitutionnel de l’accès au juge en découlant, s’opposent à ce que, dans une démocratie parlementaire, des questions juridiques, se trouvant en dehors du domaine du contenu politique, échappent à tout contrôle juridictionnel » et que le prédit principe, « ensemble celui de la séparation des pouvoirs, impliquent que dans un juste équilibre des pouvoirs, ce soit le pouvoir judiciaire qui ait le rôle d’arbitre et auquel il incombe de trancher les questions juridiques posées, dont précisément le contenu n’est pas de nature politique ».
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La Cour s’est donc déclarée compétente ratione materiae pour connaître du litige.
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Quant au fond, la Cour a jugé que « le statut du député et sa double mission de représenter le pays en tant qu’élu de la Nation détenteur par délégation d’une parcelle de la puissance souveraine et de contrôleur de l’action du gouvernement investi d’une mission permanente afférente, que le député est à considérer non pas comme tiers par rapport à l’État du Grand-Duché de Luxembourg, mais en tant qu’organe de cet État habilité à avoir connaissance, ès-qualités, des contrats et conventions conclus au nom de l’État, pareillement au(x) membre(s) du gouvernement ayant conclu au nom de l’État et aux fonctionnaires chargés de manière indispensable d’assister les ministres dans les phases de conclusion, d’application et d’exécution des contrats et conventions en question ».
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Le député a donc droit aux documents demandés, tout en étant tenu par les clauses de confidentialité.
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Cet arrêt renforce l’État de droit et le régime de la démocratie parlementaire au Grand-Duché de Luxembourg.
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Sous l’égide de Me Laurent HEISTEN, l’étude MOYSE & ASSOCIATES, qui a défendu les intérêts du député concerné, a ainsi pu contribuer à cette importante décision, qui renforce les droits des parlementaires et confirme le principe e l’État de droit.
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